La cellule archéologique du Conseil départemental vient de terminer une série de fouilles préventives dans le cadre d’une opération d’aménagement menée sur la commune d’Ecly. Trois sites ont été passés au peigne fin. Sur le premier, les archéologues ont découvert une cave romaine datant du IIIe siècle ap. J-C avec des vestiges de peinture encore intacts. Sur le second, des enclos funéraires d’environ 1 000 ans avant J-C ont été mis au jour. Enfin, le troisième site a révélé la présence d’activités datant du Paléolithique, 13 000 ans av. J-C.
Allongés face contre terre, presque immobiles, les archéologues du Département effectuent des gestes minutieux par un simple mouvement de leurs mains. A quelques dizaines de mètres, les opérations d’aménagement se poursuivent sur les autres plateformes du site, forçant les archéologues à partager le terrain avec d’imposants engins de chantier. Toutes les personnes mobilisées sur ces fouilles arborent pourtant un grand sourire. Emmenés par Caroline Trémeaud, responsable de la cellule archéologique du Conseil départemental, ils viennent de faire des découvertes qu’ils ne font pas tous les jours.
Une cave romaine avec ses enduits peints
Sur le premier des sites, l’ensemble du terrain a été nettoyé à la main par les archéologues. Sur le sol de craie blanche on aperçoit de grandes traces noires formant un rectangle. Ce sont les fondations d’une riche et grande maison romaine datant du IIIe siècle après Jésus-Christ. De cette maison, il ne reste que la cave et cette dernière est plutôt bien conservée. En plus des murs en pierre qui constituaient cette cave, de nombreux fragments d’enduits peints ont été retrouvés, ce qui réjouit Line Pastor qui supervise les fouilles sur cette plateforme. Dépêchée sur le terrain aux côtés des archéologues du Département, une toichographologue de Soisson spécialiste des peintures romaines explique que « à l’époque romaine le mortier de chaux fait office de papier peint ». Cet enduit permettait de protéger les murs tout en les embellissant. La technique de l’époque consistait à travailler à frais. Le peintre appliquait les pigments de couleurs avant que le mortier ne sèche, ce qui permettait à l’enduit d’emprisonner les pigments et ce qui explique que les archéologues puissent encore en retrouver une trace aujourd’hui. Bien conservées, de nombreuses couleurs sont présentes sur les morceaux d’enduit que les archéologues ont dénichés après de minutieuses opérations de ratissage. Retrouver de tels vestiges est assez rare, mais ce qui émeut particulièrement les équipes sur place ce sont les graffitis présents sur ces morceaux d’enduit. Ce sont peut-être des enfants dessinant sur les murs ou s’entrainant à l’écriture, une pratique courante à l’époque, qui ont laissé ces traces. Plus que des objets matériels, retrouver ce type de « moment de vie » est saisissant pour les archéologues.
Des enclos funéraires datant de 1 000 ans av. J-C
Ce sont des traces d’enclos funéraires datant de la fin de l’âge du Bronze soit environ 1 000 ans av. J.-C. qui ont été retrouvées sur le second site, un modus operandi réservé aux élites de l’époque. Un fossé était creusé à la main dans la craie. Un tertre (monticule de terre) de plusieurs mètres de haut était ensuite construit. Il abritait la sépulture du défunt. L’objectif de toute cette mise en scène : se faire voir, même mort. Ces enclos semblent dater de la Protohistoire, une époque de l'histoire de l'humanité comprise entre la Préhistoire et la période historique. Des morceaux de charbon ont été retrouvés par les archéologues, ils leur permettront de dater plus précisément ce site.
Des traces de Néandertal : une première dans les Ardennes
Accompagnés par Guillaume Asselin spécialiste de la période paléolithique au sein de Metz Métropole, les archéologues du Département ont mené des fouilles sur un troisième site. Le diagnostic préalable avait révélé la potentielle présence de traces datant de la période paléolithique. Des opérations d’évacuation des terres végétales ont été mises en œuvre afin d’atteindre les couches archéologiques qui se sont formées lors de la dernière glaciation, soit 13 000 ans av. J-C. Les archéologues sont descendus jusqu’au paléosol, un sol ancien daté d’entre – 40 000 et – 70 000 ans pour le moment. Des analyses seront lancées pour affiner cette datation. Les traces d’une occupation humaine sont visibles : outils en silex et un peu de faune. L’outillage que les archéologues ont découvert est caractéristique d’une production néandertalienne. Cette découverte est un événement inédit dans les Ardennes puisque c’est la première fois que des traces d’un sol foulé par Néandertal sont mises au jour dans le département !
Le Conseil départemental, acteur essentiel pour la recherche et la transmission
Une fois les fouilles terminées, les archéologues du Département s’attelleront à l’analyse de l’ensemble des vestiges retrouvés en vue de la rédaction d’un rapport exhaustif. Les données et les résultats de ces recherches seront conservés et consultables par d’autres chercheurs du monde entier, mais aussi par les futures générations d’archéologues. Des retours seront également faits à destination du grand public.